11 L'engrenage (v2) by John Grisham

Auteur:John Grisham [Grisham, John]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Robert Laffont
Publié: 2000-06-14T16:00:00+00:00

20

Six heures après avoir célébré sa victoire en Californie, Lake entama une folle matinée d’interviews en direct. Il en subit dix-huit en deux heures avant de s’envoler pour Washington.

Une fois arrivé, il se rendit directement à son nouveau quartier général de campagne, au rez-de-chaussée d’un grand immeuble de bureaux dans H Street, à deux pas de la Maison-Blanche. Il remercia toute son équipe, qui comptait peu de bénévoles, chauffa l’assistance à blanc et serra une multitude de mains en se demandant d’où venaient tous ces gens.

« Nous allons gagner », martela-t-il. Et tout le monde le crut.

Il s’entretint une heure avec son état-major. Il disposait de soixante-cinq millions de dollars, n’avait pas un sou de dette. Tarry avait moins d’un million en caisse et ne savait même pas combien il devait. Les comptes de campagne du gouverneur étaient en plein marasme ; l’argent n’arrivait plus, les contributions s’étaient taries. Lake raflait tout.

Ils comparèrent avec feu les mérites de trois vice-présidents potentiels. Un exercice grisant : il signifiait que la nomination était dans la poche. Le premier choix de Lake, le sénateur Nance, du Michigan, était controversé ; dans un passé lointain, il avait trempé dans des affaires louches avec des associés de Détroit, d’origine italienne. Lake n’avait aucun mal à imaginer la volée de bois vert que le sénateur recevrait dans la presse. Un comité fut désigné pour étudier la question de plus près. Un deuxième fut chargé des préparatifs de la convention de Denver. Lake voulait quelqu’un d’autre pour écrire les textes de ses interventions, quelqu’un qui commencerait à travailler sur le discours de remerciement qui suivrait l’investiture de son parti.

Il s’étonnait secrètement de ce que tout cela coûtait. Son directeur de campagne recevait cent cinquante mille dollars pour l’année – pas douze mois, mais jusqu’à Noël. Il y avait des directeurs des finances, des questions politiques, des relations publiques, des opérations et de la stratégie électorale ; ils avaient signé un contrat de cent vingt mille dollars pour une dizaine de mois de travail. Chacun d’eux avait deux ou trois personnes directement sous ses ordres, des gens que Lake connaissait à peine et qui touchaient quatre-vingt-dix mille dollars. Et puis tous ces assistants, pas des bénévoles comme pour la plupart des candidats, mais de vrais employés payés cinquante mille dollars, qui donnaient aux bureaux l’animation d’une ruche. Il y en avait des dizaines. Et aussi des dizaines de secrétaires et de sous-fifres, pas un seul à moins de quarante mille dollars.

Comme si un tel gaspillage ne suffisait pas, Lake savait que, s’il parvenait à conquérir la Maison-Blanche, il faudrait leur trouver un emploi. À tous. Ces jeunes gens qui arboraient des badges à son nom exigeraient l’accès à l’aile ouest de la Maison-Blanche et un poste à quatre-vingt mille dollars par an.

C’est une goutte d’eau dans la mer, se répétait-il. Ne t’attache pas aux détails quand l’enjeu est si important.

Les points négatifs furent repoussés à la fin de la réunion et expédiés en quelques minutes. Un journaliste du Washington Post avait enquêté sur le passé de Lake.

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